L’évolution de l’Urologie au Maghreb |
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Constantine 16-17 octobre 2010 |
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Pour avoir une idée de la place de l’urologie par le passé, je rappellerai deux dates révélatrices de l’histoire de l’Urologie. A l’aube de l’indépendance des trois pays maghrébins l’urologie était le fait de généralistes et de quelques urologues exerçant dans des services de chirurgie générale. Au Maroc, c’est en 1967 que le premier service d’urologie est créé à Rabat dirigé par Abdellatif Benchekroun. L’urologie a trouvé à la fin des années 70 son individualité. Un résidanat de quatre ans était la condition pour accéder à la spécialité. Nous étions confrontés à une pathologie urologique riche et dense habituellement rencontrée dans les pays européens, mais aussi à des pathologies différentes, liées au stade avancé des affections tumorales, à la relative fréquence des infections de l’appareil urinaire, liées également au kyste hydatique du rein dont nous avons dressé la séméiologie échographique et enfin à la fistule vésico-vaginale d’origine obstétricale devenue aujourd’hui rarissime mais dont la classification et les modalités opératoires ont pu être précisées après l’étude de centaines de cas opérés au cours des décennies 60 et 70. Très tôt les médecins maghrébins ont eu le souci de travailler ensemble. Les journées médicales maghrébines ont vu le jour à Alger en 1964 grâce à l’initiative de Madame le professeur Aldjia Benallègue et du professeur Saadeddine Zmerli respectivement Présidents des Sociétés de Médecine et de Chirurgie. Elles ont été remplacées dès 1972 par les Congrès médicaux maghrébins tenus annuellement et alternativement dans les trois pays du Maghreb. Un peu plus tard les Congrès maghrébins de spécialités sont venus compléter ces réunions. Le troisième Congrès maghrébin d’urologie vient d’être organisé à Oran le 8 janvier 2009. Au cours des années 50 et 60 trois innovations, la résection endoscopique de l ’adénome prostatique, l'utilisation du greffon iléal et la transplantation rénale allaient élargir les capacités opératoires de l’urologue et en faire un chirurgien complet maitre de son art et de sa science. L’endoscopie opératoire avec la résection transuréthrale de l’adénome prostatique allait connaitre une réussite rapide et croissante au point de réduire à l’exception les indications chirurgicales de l’adénectomie par voie haute. L'utilisation du greffon iléal , matériau de remplacement de la vessie, dont la découverte revient à mon maître Roger Couvelaire fut une véritable révolution. Il en a décrit la technique en 1951 et en a publié les premiers résultats en 1957. Il a ainsi élargi le champ de l’urologie et développé une chirurgie fonctionnelle. Depuis lors une vessie peut être agrandie ou remplacée par un greffon iléal c’est l’entérocystoplastie d’agrandissement ou l’entérocystoplastie de substitution. La transplantation d’organes est certainement la plus belle avancée de la chirurgie moderne. Là aussi l’urologie s’est distinguée en réalisant avec succès les premières greffes d’organes entre jumeaux identiques en 1954. L’échec des greffes entre faux jumeaux fait poser le problème d’incompatibilité biologique.. L’immunodépression par l’irradiation des receveurs avec les rayons X pour annihiler leurs réactions immunitaires, traitement lourd n’a pas eu les résultats escomptés. Après un début timide la transplantation s’est confirmée progressivement. Aujourd’hui plus d’un millier de greffes ont été réalisées en Tunisie, 700 en Algérie et 350 au Maroc. De même les centres de transplantation se sont multipliés, 3 au Maroc, 5 en Tunisie et 11 en Algérie. Je souhaiterais évoquer les problèmes éthiques et de société que pose le don d’organes dans notre Maghreb en vous exposant mon expérience personnelle de la greffe rénale. A l’époque, le prélèvement d’organes sur le vivant n’avait aucun substrat légal. Or les greffes étaient, pour la plupart, réalisées à partir de donneurs vivants, nous renvoyant à ce vide juridique qui devait soulever de lourds problèmes de responsabilité. Malgré l’aval des autorités religieuses et administratives du pays, l’engagement du donneur certifié par la mairie, et son information des risques encourus, le transplanteur c'est-à-dire le chirurgien restait malgré toutes ces précautions vulnérable au regard de la loi. Le statut juridique du donneur vivant en assurant la protection légale du donneur et du transplanteur a favorisé, sur le plan pratique, la greffe entre vivants. L’hôpital Charles Nicolle, qui en réalisait annuellement avant la loi une quinzaine, en effectue actuellement une trentaine. Début janvier 2010 on comptait 1002 greffes dont les 3/4 sont des greffes entre vivants. Leur nombre a quadruplé au cours des 3 années de 2005 à 2007, pour être multiplié par 7 en 2008. Cette augmentation est due l’entrée en lice de quatre nouveaux centres. Ces équipes par leur savoir faire et leur compétence ont su améliorer leur performance ; Elles prouvent également que l’institution hospitalo-universitaire et en particulier les services d’urologie sont l’habitacle naturel de la transplantation rénale et de la formation des futurs transplanteurs. L’étroite collaboration des urologues et des néphrologues a contribué et contribue grandement à la réussite de la transplantation rénale. C’est le règne de la chirurgie mini invasive, un bouleversement des gestes chirurgicaux concernant une pathologie fréquente. Au Maghreb, ces nouvelles techniques ont commencé à être utilisées à la fin des années 80. Quant à la la néphrolithotomie percutanée, pratiquée pour la première fois en 1993 en Tunisie, son usage s’est rapidement étendu aux 5 services universitaires. Il en est de même pour l’urèteroscopie. Ces techniques sont exécutées à l’hôpital des armées à Alger depuis plusieurs années. Les années 90 verront le développement de la chirurgie laparoscopique. A la fin des années 90, la prostatectomie radicale devient une indication courante de la cœlioscopie . Et la bataille âpre entre les tenants de la chirurgie ouverte et ceux de la laparoscopie a tourné à l’avantage de ces derniers. Avec un décalage de dix ans, au Maghreb le développement de la laparoscopie connaitra la même évolution. Cette chirurgie assistée par ordinateur permettant de commander à distance des micromanipulateurs doublés d’une vision en 3D procure une meilleure vision du champ opératoire et une plus grande précision des gestes qu’en cœlioscopie non assistée. Si les avantages de la chirurgie robotisée se manifestent pour la plupart des interventions laparoscopiques en urologie, c’est pour la prostatectomie radicale que son utilisation prédomine. Il y a peu de chances de la voir se développer actuellement au Maghreb en raison du cout du matériel (1 million d’euros) et des consommables pour chaque patient de l'ordre de 1200 euros. Mais la diminution financière de cette composante matérielle prévisible en fera une thérapeutique de choix en raison de son apprentissage facilitée par la chirurgie virtuelle. L’urologie, de par ses innovations, a vu son individualité apparaitre rapidement depuis les années 60 et son champ d’activités s’étendre de la lithiase à la cancérologie, en passant par l’andrologie, l’incontinence urinaire, les troubles de la statique pelvienne et la transplantation rénale. L’urologie est devenue une grande spécialité. ¹Homotransplantation rénale chez l'homme. In Journal d'Urologie et de Néphrologie, 1964, 70, p. 867-881. |